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Drug Stories
20 septembre 2012

Chroniques de la fin d'un monde - CHAPITRE 10

 

 

Chroniques BlogLUCA

 

09 juin 2014

 

Hier, j'ai tout dit à papa. Il n'était pas fâché, il avait juste l'air très triste. Je lui ai demandé ce que c'était le message à la radio et il m'a dit qu'il se passait des choses graves, là-bas dehors et que nous on devait pas sortir tant que les secours étaient pas arrivés. Je lui ai demandé pourquoi il me l'avait pas dit, que j'étais plus un bébé. Il m'a dit : « Je voulais pas te faire peur. » Et c'est vrai que maintenant j'ai peur. Il a rajouté qu'il avait aucune idée de ce qui se passait et je le crois. Je crois que lui aussi il a peur et c'est la première fois de ma vie que je me rends compte que papa peut aussi avoir peur. Il était pas fâché pour la radio et il a même dit que je pouvais la rallumer et que ce serait bien si je pouvais parler à quelqu'un mais j'ai réessayé, personne ne répond.

Je lui ai demandé la permission d'aller voir Louise et il a dit : « Non. C'est non, Luca. On ne sort pas de la maison. Louise et ses parents ils ne peuvent pas sortir non plus, ils se fâcheraient si ils te voyaient dehors. »

Alors je lui ai dit que lui, il était sorti le premier jour pour voir les parents de Louise mais il a dit que c'était pas pareil. Que c'était un adulte et que, donc, c'était pas pareil. Mais au fond, je vois pas ce qui est pas pareil. Je lui ai demandé si ils allaient bien mais il a juste murmuré un « Oui, je crois ». C'est bizarre. J'ai peur pour Louise. Il n'y a pas de lumière chez eux mais papa a dit que c'était normal, qu'il n'y avait plus d'électricité : « Nous on a un transformateur au garage, c'est pas pareil. » il a rajouté.

Je lui ai raconté pour le bruit à la cave mais il a dit que c'était rien, que je m'imaginais des choses quand j'étais à la cave parce que depuis que j'étais petit, j'avais une peur terrible de la cave. Mais quand même, je sais que j'ai entendu des vrais bruits.

Papa a pris son fusil et il a fait le tour des fenêtres, pour me montrer qu'il n'y avait rien dehors.

Il m'a expliqué que le sable, le soir, c'était comme des tempêtes tropicales. Ça allait passer. Je lui ai demandé d'où il venait le sable noir et il m'a juste répondu qu'il n'en savait rien mais que ça allait passer.

Après, je suis allé lire dans ma chambre. Un épisode du Commissaire Super. Dans cet épisode, le Commissaire Super pourchasse son fils. C'est un criminel qui braque des banques et des bijouteries mais il ne tue jamais personne. Il prend tout l'argent mais il n'en fait jamais rien. La plupart du temps, on retrouve l'argent, dispersé dans les rues des quartiers pauvres. C'est un peu comme un Robin des Bois mais le Commissaire Super dit qu'un criminel reste un criminel quoi qu'il fasse avec ses butins.

Dans l'épisode, il coince son fils dans un vieil entrepôt. Ils sont tous les deux, seuls. Le Commissaire lui demande : « Pourquoi agis-tu ainsi ? Rejoins moi du coté des gentils. On peut lutter pour la justice ensemble. » et son fils lui répond : « Tu crois être du bon côté mais tu ne l'es pas. Tu es autant en prison que les criminels que tu y jettes. Moi, je suis libre. » Le Commissaire Super reste perplexe et lui demande ce qu'il a raté, avec son éducation. Et son fils lui dit : « Tout, Commissaire, tout. »

Jamais il n'appelle son père papa mais Commissaire. C'est étrange.

Alors le Commissaire Super sort son arme et dit à son fils qu'il n'a pas le choix, qu'il doit l'arrêter. Son fils explose de rire. « Vois ce qu'ils ont fait de toi. Prêt à arrêter ton propre fils, Commissaire. Tu as perdu toute morale, ton esprit est vide et à choisir entre la vie qu'ils t'ont offerte et le crime, je choisis le crime ! »

Le Commissaire est ébranlé par ce que lui dit son fils et il abaisse son arme. L'autre en profite et s'enfuit par une fenêtre, en sautant du troisième étage. Et c'est la fin de l'épisode. Le Commissaire Super rentre au commissariat et ses collègues ne lui disent rien parce qu'ils savent que c'est dur pour lui de lutter contre son fils et de ne jamais pouvoir l'arrêter.

Il y a même l'inspecteur Joles qui lui dit : « Le jour où tu voudras arrêter ton fils, tu l'arrêteras. » Le Commissaire Super lui répond qu'il le veut, vraiment. Et l'autre se contente de hausser les épaules.

 

Je ne comprends pas vraiment son fils. C'est bizarre ce qu'il dit à son père. Et pourquoi il l'appelle Commissaire et tout ça. Le fils, c'est un personnage qu'on aime pas et qu'en même temps on aime bien. Et à chaque fois qu'il y a une histoire avec son fils, le Commissaire Super, il est un peu moins Super. Il est même un peu nul. Il arrive jamais à l'arrêter et il trouve jamais rien à lui dire pour lui faire changer d'avis, sur le crime et tout ça.

Papa dit que l'auteur doit avoir un problème avec son père mais je ne sais pas pourquoi il dit ça. Peut être que je suis trop petit pour comprendre. En tout cas, c'est ce que dit papa. Moi, si papa était le Commissaire Super, je serai super fier et je voudrais l'aider dans ses enquêtes.

 

10 juin 2014

 

Il n'y a toujours personne à la radio. A part le message du gouvernement qui tourne en boucle.

Papa, il boit du whisky en bas, avec son fusil. Je crois qu'il parle un peu tout seul. Il a l'air triste, j'aime pas ça.

J'ai décidé de faire une nouvelle bêtise tout à l'heure. Je vais aller voir Louise, même si papa il veut pas. Je suis déjà sorti dehors et je suis pas mort, non ? Je ne sortirai pas pendant les tempêtes, ça non. Mais la journée, moi je dis que ça risque rien. Louise, elle doit s'ennuyer. J'ai envie de savoir comment elle va. Et de jouer un peu avec elle. Juste le temps de faire une partie d'échecs, de la battre (je la bats toujours) et je rentre, ni vu ni connu.

Comme papa a fermé la fenêtre de derrière, je vais passer par la porte de la cave, celle qu'on ouvre jamais. Ça me fait un peu peur mais bon, ça va, je suis plus un bébé. Et puis, Louise m'aidera à résoudre toute cette énigme des orages et tout. Je piétine. Elle en sait peut-être plus que moi.

Après manger, je ferai semblant de réfléchir à l'énigme de papa dans ma chambre et j'irai dans la cave. Souhaite moi bonne chance, cher journal !

 

 

Je regrette ma bêtise ! Si tu savais, journal, ce qui s'est passé. Je suis sorti par la porte de la cave et j'ai fait le tour du jardin pour passer par derrière, comme l'autre fois. Sauf qu'une fois dans le jardin, je me suis retrouvé nez à nez avec l'homme malade de l'autre jour, l'homme arbre ! Il était assis dans une drôle de position dans l'herbe sèche. On aurait dit qu'il dormait. Je suis resté bloqué et je l'ai fixé du regard, je ne pouvais plus bouger. Et là, en quelques secondes, il était debout et il avançait vers moi, comme si il avait senti ma présence. J'ai hurlé aussi fort que j'ai pu. Il a continué à s'avancer vers moi, avec ses yeux noirs. Je me suis collé à la porte de la cave mais je ne pouvais pas faire un geste, j'étais tétanisé par la peur. J'aurai du rentrer dans la cave et m'enfermer maintenant que j'y pense mais sur le coup, je n'arrivais même plus à penser. Je hurlais à pleins poumons, c'est tout.

Il est venu sur moi et il m'a attrapé par le pull. Il m'a soulevé, mes pieds ne touchaient même plus par terre et son visage a presque touché le sien. Ses yeux étaient horribles, tout noirs et méchants. Je ne sais pas ce qu'il voulait. Me tuer, sûrement. Mais pourquoi, je ne lui avais rien fait, non ? Il m'a dit quelques mots, d'une voix bizarre. « Ils arrivent. Vous n'avez plus rien à faire là. »

Puis un coup de feu a retenti dans l'air. L'homme-arbre a été éjecté à plus de trois mètres. Sa tête pendait étrangement sur son torse. Il s'est écroulé au sol et c'était fini. Je n'entendais plus rien à part un sifflement aigu dans mes oreilles. Papa était là, derrière moi, son fusil armé, de la fumée en sortait. Je me suis mis à pleurer et à respirer très fort, comme si je m'étouffais. Papa est arrivé vers moi, m'a mis une baffe si fort en pleine figure que je me suis évanoui.

 

Quand je me suis réveillé, papa buvait un whisky dans le salon et j'étais couché dans le canapé. J'avais mal partout et je ne savais même plus où j'étais. Quand je me suis rappelé, j'ai eu honte de moi et de la bêtise que j'avais fait. Surtout que c'était la deuxième fois que je la faisais. J'ai murmuré : « Papa.. je voulais juste aller voir Louise. » et il m'a répondu une chose horrible d'un ton glacial que je ne lui connaissais pas : « Louise est morte, Luca. Et ses parents aussi. Depuis bientôt une semaine. »

Il a continué à boire son whisky et n'a plus rien dit. La tête me tournait et je me suis rendormi, le cœur en miettes, le cerveau en purée. Je ne pouvais pas croire ce qu'il avait dit. J'ai fait des cauchemars horribles avec des monstres qui faisaient du mal à Louise et quand je me suis enfin réveillé, j'étais dans mon lit, la tête en feu et je m'étais fait pipi dessus. Ça faisait des années que ça ne m'était pas arrivé.

Papa est super en colère et si il dit vrai pour Louise et ses parents alors mon enquête touche à sa fin. Il ne m'aurait pas menti. Je le sais. Je ne sais pas ce que je dois faire.

Cette nuit, j'ai envie que papa dorme avec moi mais je n'ose pas le lui demander.

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